Et si vous preniez la place d’un jury de VAE l’espace d’un instant ?

Si vous quittiez vos chaussures de candidat VAE, pour comprendre ce qu’on attend de vous.

Vous acceptez le challenge ?

Merveilleux.

Vous voilà donc entré dans le costume de jury.

Vous donnez, chaque année, quelques journées de votre vie personnelle,

Pour contribuer à la reconnaissance de nouveaux professionnels dans votre domaine d’activités,

En leur délivrant un diplôme.

Dans le cadre de sessions collectives organisées pour les oraux, vous recevez une dizaine de livret 2 à parcourir et évaluer,

Souvent avec un délai assez serré.

Vous tenez néanmoins à accorder du temps pour chacun des dossiers de VAE,

Parce que, justement, les candidats ne sont pas des dossiers…

Il y a leur âme, leur patte, leur dévouement, leur réflexion, du temps passé dans la présentation de leur parcours, et souvent un rêve : celui d’obtenir enfin le diplôme qu’ils désirent tant !

Vous souhaitez donc respecter ce travail, en y passant le temps nécessaire, afin de prendre connaissance du :

  • Parcours du candidat
  • De lire son écrit
  • Et l’évaluer
  • Avant de rencontrer les autres membres du jury et de partager vos évaluations respectives
  • Puis de rencontrer le candidat lors de son oral

Maintenant que vous avez le contexte, je serai votre guide pour mener l’autopsie d’un livret 2 raté.

Elle se réalisera en deux temps :

  • Une observation externe
  • Puis une analyse approfondie de l’écrit

Démarrage de l’autopsie : 7h02


J’aime feuilleter le dossier VAE dans son ensemble, avant d’en démarrer la lecture.

Il me permet d’avoir une vision globale de ce qui m’attend.

Un peu comme lorsqu’on entre dans un café, et qu’on s’imprègne de l’ambiance,

Avant d’envisager de s’y poser un moment.

Ce premier livret 2 reçu donne une image peu professionnelle du candidat.

Mise en page bâclée.

Différentes tailles de polices d’écriture utilisées.

Encadrement de l’écrit qui a visiblement donné du fil à retordre au candidat…

Absence de titres et de paragraphes…

Je soupire…

Il est plutôt au stade du brouillon, que du dossier finalisé.

Allez, on lui laisse sa chance, malgré cette mauvaise impression.

Il a peut-être manqué de temps dans les dernières semaines…

Analyse d’une vie


Je m’attarde, dans un premier temps, à lire les tableaux d’expériences et de formation du candidat.

Sacré parcours.

Une belle évolution professionnelle dans les fonctions assurées, depuis 11 ans.

Des changements d’entreprises, qui enrichissent naturellement l’expérience.

Des formations fréquentes.

Cela me plait, et rattrape ma première impression.

Je m’empresse de lire la présentation des motivations du candidat.

La Foir’Fouille


Cette première partie doit, théoriquement, donner le ton, pour la suite de la lecture.

Je déchante.

Où veut-il en venir ?

C’est fouillis.

Quelques compétences par-ci,

Une VAE pour obtenir un diplôme qu’il « mérite » par là,

Je ne perçois pas l’évolution professionnelle dans sa présentation,

Ni les compétences acquises justifiant de cette démarche de VAE,

Ni le lien avec le diplôme visé …

C’est assez sceptique que je continue ma lecture.

Le flou artistique


Je poursuis avec la présentation de son environnement professionnel.

L’absence de plan, et de structure dans cette présentation, la rend peu compréhensible,

Quelques informations sur l’entreprise, avant d’évoquer le service concerné,

Pour revenir ensuite sur l’histoire de l’entreprise.

C’est décousu.

Je n’ai pas une image claire de l’organisation, du mode de fonctionnement, du cadre de travail…

Allez : je lui laisse une autre chance et note cette question pour l’oral de VAE, sur mon rapport.

Poursuivons…

Développement d’expériences


C’est ce que je craignais…

Un démarrage chaotique laisse rarement place à une révélation.

Des généralités.

« Je fais ci…

Je fais ça… »

Un « copier-coller » du référentiel des activités…

Mais aucune situation de travail précise, issue de son expérience.

Aucune analyse.

Des « je dois », « on me demande de faire »…

Je ne perçois aucune autonomie dans le poste, ni de réflexion.

Et cerise sur le gâteau :

PAS D’ANNEXES, à l’exception des documents administratifs demandés.

Je prends le temps de lire l’intégralité du récit proposé.

Un coup d’œil sur les blocs de compétences attendues, au fil de ma relecture…

Je ne suis pas en mesure d’évaluer ce candidat, puisqu’il n’est pas en situation de travail.

Ne vous méprenez pas


Comprenez bien mon propos.

M’indiquer que vous faites telle ou telle activité peut servir d’introduction à votre situation.

Mais ensuite, j’ai besoin de vous voir en action.

Je dois être capable de comprendre votre fonctionnement.

D’identifier la méthode et les outils utilisés.

Le processus respecté.

Les lois, décrets, normes, règles… qui encadrent votre action.

Je veux aussi comprendre les résultats obtenus et votre analyse de la situation.

Les difficultés rencontrées, vos actions pour y remédier…

Si vous êtes éducateur, je dois percevoir l’accompagnement que vous menez,

Les problématiques que vous décelez,

Je veux les vivre dans votre récit, à travers votre regard.

Profitez de votre analyse, de vos doutes, de vos questionnements…

Si vous êtes vendeur, je veux parcourir les différentes étapes de la vente,

La découverte des besoins de votre client,

L’expertise apportée, le traitement des objections…

Je veux aussi voir votre ADN de vendeur…

Si vous êtes manager, je veux que votre écrit transpire le leadership,

Vous voir en action, embarquer vos équipes dans un objectif challengeant,

Être à l’écoute et présent, tantôt ferme, et tantôt conciliant…

Comprenez-vous l’autopsie que nous sommes en train de mener ensemble ?

Vous devez sélectionner une activité, une situation, un projet mené, qui vous place en situation d’exercice ?

Et vous devez me permettre, autant que possible, de revivre cette scène, ce parcours professionnel, avec vous.

Je terminerai cette analyse, en vous proposant cette citation d’Austin Kleon :

« Les mots ont un poids. (..) Les êtres humains aiment savoir d’où viennent les choses, comment elles ont été faites, qui en est l’auteur. Ce que vous racontez sur vos projets à un énorme effet sur le ressenti de votre public, sur ce qu’il comprend de votre travail, qui finit par modifier l’intérêt qu’il lui porte ». Pourquoi parler des frustrations et des illuminations dans l’atelier, ou de la sueur et des larmes qui précèdent le résultat final ? se demande l’artiste Rachel Sussman. Parce qu’à de rares exceptions près, notre public est humain, et l’humain raffole du lien ».

Tendance avant l’oral de VAE


Avant de retrouver mes collègues jurys pour l’oral, je note mes réserves constatées, durant ce travail préparatoire, que je partagerai par la suite avec eux, durant notre phase d’échange.

En termes d’avis, la tendance est plutôt au refus de validation.

L’oral ne permettra pas de compenser les faiblesses de l’écrit.

Il nous faudrait questionner le candidat sur l’ensemble du référentiel : étant resté bien trop évasif sur son expérience.

Dans un style énumératif.

C’est insuffisant.

Et le constat des autres jurys est également sans appel.

Le candidat n’aura pas son diplôme… cette fois-ci.

Bilan de cette autopsie


Le but n’est évidemment pas de dénigrer les écrits des candidats.

Je sais, ô combien, que l’exercice rédactionnel demandé peut s’avérer être difficile.

Ce que je ne veux pas, en revanche, et que j’avoue ne plus supporter,

Ce sont les candidats qui dénigrent le dispositif de VAE,

Alors qu’ils n’en ont manifestement pas compris les objectifs.

Si vous livrez un écrit à côté de la plaque,

Ce n’est pas votre expérience, attestée par des bulletins de salaire, qui fera de vous le prochain diplômé.

Personne ne vous doit rien.

Vous devez réaliser ce travail de restitution de votre expérience professionnelle,

De conscientisation de vos actions, modes de faire, compétences acquises,

Et d’analyse des actions menées…

C’est cette conscientisation de votre expérience,

Qui fera basculer vos compétences au stade de la connaissance,

Et ce sont ces connaissances qui seront frappées d’un diplôme.

Dernier conseil pour réussir


« La clé d’un récit tient à sa structure.

Une bonne histoire est nette, précise et logique.

Malheureusement, la vie a tendance à être brouillonne, incertaine et illogique.

Il nous faut parfois recadrer et éditer notre vie pour qu’elle s’apparente à une histoire. »

Austin Kleon

Vous avez donc deux options pour réussir cette prouesse :

  • Étudiez vous-même l’art de la narration, comprendre les rouages d’un récit, et lui emprunter sa structure pour raconter votre histoire dans un livret 2, en faisant le lien avec les compétences attendues pour la certification visée
  • Ou recourir à une personne qui maitrise ces rouages, et vous livrera une méthode à appliquer : comme un accompagnement VAE pour exemple

Que retenez-vous comme solution, pour réussir votre livret 2 ?

Fin de l’autopsie : 13h45.

Alexandra

Accompagnatrice VAE Certifiée

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